Xavier Azalbert, France-Soir
La tension entre l'humain et la normatisation. Préserver la créativité dans un monde de frameworks - partie II
Cet article est le second volet d'une série dédiée à l'exploration des frameworks, ces cadres méthodologiques qui structurent nos sociétés, nos pensées et nos actions. Dans le premier article, nous avons retracé leur histoire, des stratégies militaires de Sun Tzu aux outils numériques comme MITRE ATT&CK, en passant par les réformes éducatives de Jules Ferry. Nous avons vu comment ces cadres, nés des services de renseignement et des sciences sociales, standardisent, influencent et coordonnent, mais également comment ils peuvent limiter l'unicité humaine. Ce second volet plonge dans cette tension : l'humain, avec sa complexité, sa créativité et ses imperfections, face à la "normatisation" imposée par les frameworks. Ces outils, en cherchant à harmoniser nos comportements via un consensus, un loyalisme et une logique linéaire, risquent d'étouffer ce qui fait notre force : notre désordre, notre pluridisciplinarité, notre « folie », et nos intelligences plurielles. Comme le souligne l'article « De l'importance du désordre » publié dans France-Soir, le chaos, loin d'être un défaut, est une source d'authenticité et d'innovation. En explorant des figures comme Léonard de Vinci, Einstein ou Socrate, des concepts comme le quotient intellectuel (QI) et le quotient d'utilité (QU), des cas comme la jurisprudence Hertel, et des dynamiques comme la non-linéarité et la dissension, nous verrons comment cultiver notre unicité face à une matrice normative – et aux machines qui menacent de nous surpasser par paresse. Les prochains articles examineront les usages modernes des frameworks dans l'information et les moyens de contrer leur influence.

L'humain, un être complexe, pluridisciplinaire et imparfait
Qu'est-ce qui rend l'humain si singulier ? Contrairement à une machine, dont chaque rouage suit un algorithme prévisible, l'humain est un kaléidoscope d'émotions, de pensées, d'intuitions et d'erreurs. Ses neurones tissent des connexions inattendues, des « bonds » qui échappent à la logique déterministe. Cette intelligence, loin de se limiter à la logique cartésienne – ce raisonnement linéaire où chaque cause mène à un effet attendu – est un entrelacs de logiques plurielles.
Howard Gardner, avec sa théorie des intelligences multiples, a montré que l'humain excelle dans des domaines variés : linguistique, comme l'éloquence de Victor Hugo ; spatiale, comme la vision architecturale de Le Corbusier ; interpersonnelle, comme l'empathie de Gandhi ; ou musicale, comme la sensibilité de Mozart. Cette non-linéarité, où les idées surgissent en zigzags, en ruptures imprévisibles, est une force unique. La science a embrassé cette complexité : la mécanique quantique, avec ses probabilités défiant l'intuition, a révélé un univers où les particules dansent sans suivre un chemin droit. Les fractales, découvertes par Benoît Mandelbrot, montrent des motifs chaotiques qui se répètent à l'infini, une logique non linéaire, autre forme d'harmonie, qui fascine autant qu'elle déroute. Comme le décrit « De l'importance du désordre », « le chaos n'est pas une faiblesse, mais une condition essentielle à la créativité et à l'authenticité ». L'humain n'est pas un rouage lisse : il est une vague, un flux de molécules d'eau qui s'organise un instant avant de se disperser, selon la théorie du chaos de René Thom.
Ce « désordre » est un arrangement différent, une source de découvertes.
Prenez Léonard de Vinci, cet esprit de la Renaissance qui jonglait entre peinture, anatomie, ingénierie et philosophie. Ses carnets, griffonnés de machines volantes et d'observations sur le cœur humain, témoignent d'une pensée qui refusait les frontières des disciplines. Michel-Ange, sculpteur du David, peintre de la chapelle Sixtine et architecte de Saint-Pierre de Rome, incarnait lui aussi cette pluridisciplinarité, défiant les cadres rigides de son époque. Albert Einstein, physicien révolutionnaire, trouvait dans la musique – il jouait du violon – et la philosophie des clés pour repenser l'univers.

Hypatie, mathématicienne et philosophe d'Alexandrie au IVe siècle, mêlait astronomie, géométrie et spiritualité, défiant les normes patriarcales de son temps. Srinivasa Ramanujan, mathématicien indien du XXe siècle, autodidacte et guidé par des intuitions presque mystiques, a révolutionné les mathématiques avec des formules qui semblaient surgir du chaos. Leur intelligence, non linéaire, provoquait des ruptures de tendance : Einstein, par exemple, a brisé la logique cartésienne de Newton avec une relativité qui semblait absurde à ses contemporains.
Ces figures montrent que la créativité humaine prospère lorsqu'elle transcende les normes, mêlant des savoirs que les frameworks modernes cloisonnent.
Et puis, il y a la « folie », cette unicité qui, dans ses instants de lucidité, produit des éclairs de génie. Vincent van Gogh, tourmenté par ses démons, a peint des tournesols et des nuits étoilées qui ont redéfini l'art. John Nash, mathématicien schizophrène, a élaboré la théorie des jeux, fondement de l'économie moderne, dans des moments de clarté. Nikola Tesla, avec ses visions excentriques, a imaginé l'électricité sans fil, une rupture technologique inconcevable à son époque. Virginia Woolf, écrivain dont les troubles bipolaires ont nourri des œuvres comme Mrs Dalloway, a capturé la complexité de l'âme humaine avec une sensibilité non linéaire. Leur désordre mental, loin d'être un obstacle, était une porte vers l'innovation, un exemple de pensée où l'intuition et le chaos surpassent la raison cartésienne. « C'est dans ce chaos, cette imperfection, que l'humain trouve son authenticité ».

Mais ce désordre ne se limite pas à la créativité individuelle : il s'exprime aussi dans le désaccord. Socrate, en questionnant sans relâche les vérités établies d'Athènes, a défié le consensus de son temps, posant les bases de la philosophie occidentale. Son refus de se conformer, même au prix de sa vie, montre que le désaccord est une obligation pour faire avancer la pensée. Ce désaccord, non linéaire, brise les schémas cartésiens pour ouvrir des nouvelles perspectives, comme une vague qui change de forme à chaque instant.
Ces exemples – pluridisciplinarité, folie, désaccord – révèlent une vérité : l'humain, avec ses intelligences plurielles, est plus grand que les cadres qui cherchent à l'ordonner.
La "normatisation", une matrice de consensus et de loyalisme
Pourtant, depuis des siècles, les frameworks cherchent à domestiquer ce chaos. Ils imposent des normes, des consensus et un loyalisme qui, sous couvert d'efficacité, risquent de nous priver de notre essence. « Notre société est prisonnière d'une obsession de l'ordre, qui étouffe l'authenticité au profit d'une uniformité prévisible ». Cette « matrice » normative, pour reprendre l'image du cadre DISARM qui cartographie les campagnes de désinformation, n'est pas nouvelle. Elle s'enracine dans les sermons médiévaux, qui diffusaient un message unique pour contrôler les croyances, ou dans les réformes éducatives de Jules Ferry, qui ont standardisé l'instruction pour intégrer les citoyens à l'ère industrielle.

Le consensus est au cœur de cette matrice. Les frameworks, qu'il s'agisse du modèle AIDA en marketing, des protocoles d'entreprise ou des programmes scolaires, visent à aligner les individus sur une vision commune. Ce consensus se forme par des mécanismes complexes : la pression sociale, où les normes sont intériorisées par peur du rejet ; l'autorité institutionnelle, comme les académies scientifiques qui dictent les vérités acceptables ; ou les récits dominants, amplifiés par les médias modernes, des journaux du XIXe siècle aux algorithmes des réseaux sociaux. Au XVIIe siècle, le procès de Galilée, condamné pour avoir soutenu l'héliocentrisme, illustre ce mécanisme : l'Église, garante du consensus géocentrique, a rejeté une vérité non linéaire au nom de l'ordre. Aujourd'hui, les campagnes de désinformation, orchestrées via des cadres comme DISARM ou d'autres outils plus sophistiqués à base d'IA, manipulent les perceptions pour imposer un consensus artificiel.
Prenez l'éducation : les lois de Ferry, en 1881-1882, ont organisé les matières en « clusters » (mathématiques, lettres, sciences), imposant un consensus sur ce que chaque enfant devait apprendre. Ce système, ancré dans une logique cartésienne, privilégiait la linéarité – apprendre, mémoriser, reproduire – au détriment des intelligences plurielles, comme l'intuition ou la créativité, qui prospèrent dans le désordre. Il a démocratisé le savoir, mais marginalisé les profils atypiques – les « dys », par exemple – dont les talents ne rentraient pas dans ces cases.
Mais, le consensus ne serait rien sans le loyalisme, cette adhésion parfois aveugle aux normes. La psychologie de la conformité, étudiée par Solomon Asch dans les années 1950, montre comment les individus adoptent les normes par peur du rejet, même face à des évidences contraires. Dans une expérience célèbre, des participants ont nié l'évidence d'une longueur de ligne pour se conformer à la majorité. Un employé qui suit des protocoles d'entreprise sans réfléchir peut ignorer des failles éthiques. Un scientifique loyal à un consensus peut rejeter des données, comme dans le cas de la jurisprudence Hertel. Dans les années 1990, Hans Hertel, un chercheur suisse, a été censuré pour ses études suggérant que les micro-ondes altéraient les aliments. Son travail, bien que controversé, a été étouffé par un consensus scientifique qui refusait le désaccord, illustrant un danger : le loyalisme aux normes peut mener à un aveuglement, où la vérité est sacrifiée au nom de l'ordre.
Ce loyalisme entre aussi en conflit avec des valeurs supérieures, comme la justice ou la liberté. Edward Snowden, en révélant les programmes de surveillance de la NSA, a défié la norme institutionnelle pour défendre la vérité, au prix de son exil. Dans l'industrie pharmaceutique, le loyalisme aux protocoles standardisés peut servir des conflits d'intérêts, où les profits priment sur la santé publique. Dans l'industrie alimentaire, des normes laxistes sur les additifs, soutenues par des lobbies, ont parfois ignoré des études alarmantes pour maintenir un consensus économique. Historiquement et même si l'histoire est controversée, Jeanne d'Arc, guidée par sa foi et son intuition, a défié les normes politiques et religieuses, incarnant une résistance aux consensus oppressifs. Ces exemples révèlent les limites du loyalisme : éthique, lorsqu'il viole des principes moraux ; sociale, lorsqu'il marginalise les dissidents ; pratique, lorsqu'il rejette des solutions innovantes ; contextuelle, lorsqu'il s'avère inadapté à des crises imprévues.
Peu de gens réalisent à quel point cette matrice normative, tissée de consensus et de loyalisme, façonne nos vies, des écoles aux laboratoires, en étouffant l'authenticité humaine.
Mesurer l'humain : QI, QU et limites de la catégorisation
Les frameworks ne se contentent pas d'organiser : ils mesurent l'humain, souvent en le réduisant à des cases. Cette mesure repose sur une logique cartésienne, qui privilégie la linéarité et la prévisibilité, ignorant les intelligences plurielles qui font la richesse humaine. Le quotient intellectuel (QI), développé par Alfred Binet en 1905, est un exemple emblématique. Conçu pour évaluer les aptitudes cognitives des enfants, il privilégie la logique et la mémoire, mais ignore la créativité, la pluridisciplinarité ou l'éthique. Un inventeur comme Thomas Edison, souvent médiocre à l'école, aurait été sous-estimé par le QI, pourtant ses innovations, comme l'ampoule électrique, ont transformé le monde. Alan Turing, père de l'informatique, était un esprit atypique dont le génie mathématique échappait aux normes académiques. La science elle-même a montré les limites de cette logique : la mécanique quantique, avec ses probabilités défiant l'intuition, ou la théorie du chaos, avec ses systèmes imprévisibles, ont révélé que la raison cartésienne échoue à saisir la complexité.
Le QI, en imposant un consensus linéaire sur l'intelligence, marginalise les formes d'intelligence multiples – émotionnelle, intuitive, créative – décrites par Howard Gardner. Un musicien comme Mozart déployait une intelligence musicale ; un leader comme Gandhi, une intelligence interpersonnelle.
Face à ces limites, le quotient d'utilité (QU), proposé par Didier Audebert dans « Quotient d'utilité : Devenons chaque jour plus utile ! », offre une alternative. En valorisant l'impact social – par exemple, une femme organisant un réseau de solidarité dans son quartier, un enseignant partageant ses savoirs bénévolement, ou un adolescent lançant une initiative écologique – le QU reconnaît des intelligences éthiques et interpersonnelles que le QI ignore. Comme le souligne un article Dys sur Dys, les systèmes éducatifs, obsédés par le QI, orientent souvent les élèves « dys » (dyslexiques, dyspraxiques) vers des filières manuelles, ignorant leur potentiel d'utilité sociale. Le QU, en valorisant l'authenticité et la contribution, défie ce consensus normatif.
Les cadres de personnalité, comme le Myers-Briggs Type Indicator (MBTI), suivent une logique similaire. Développé dans les années 1940, le MBTI classe les individus en 16 types (ex. : INTP, ESFJ), imposant un consensus sur ce qu'est une « bonne » personnalité. Son évolution vers le Big Five (ouverture, conscience, extraversion, agréabilité, névrosisme) est plus nuancée, mais reste normative, incapable de saisir la fluidité ou la « folie » humaine. Un écrivain comme Franz Kafka, avec sa sensibilité tourmentée, ou un musicien comme Kurt Cobain, avec son intensité émotionnelle, ne rentrerait pas dans ces cases. Ces cadres, en cherchant à linéariser la complexité humaine, rejettent les intelligences plurielles qui prospèrent dans le désordre et la non-linéarité.
C'est dans ce chaos, cette imperfection, que l'humain trouve son authenticité. Le désaccord avec ces normes est essentiel pour reconnaître la diversité humaine, qu'il s'agisse de la pluridisciplinarité de Léonard de Vinci ou de l'excentricité de Tesla.
Codifier la créativité, un paradoxe normatif
Si l'humain est un chaos créatif, peut-on codifier sa créativité sans la détruire ? Les frameworks modernes, comme le design thinking, tentent de structurer l'innovation en étapes (empathie, idéation, prototypage). Mais, cette approche, bien qu'utile, peut brider les idées spontanées, celles qui surgissent dans un moment de désordre. « C'est dans le chaos, non dans l'ordre, que naissent les véritables percées ». La non-linéarité, au cœur de la créativité, permet des ruptures de tendance – ces moments où une idée défie la logique cartésienne pour ouvrir un nouveau paradigme. La science a progressé grâce à ces ruptures : la mécanique quantique a brisé l'idée d'un univers linéaire ; les fractales de Benoît Mandelbrot, avec leurs motifs chaotiques, ont révélé la beauté du désordre. Dans l'art, le cubisme de Pablo Picasso a bouleversé les conventions picturales, une rupture non linéaire qui a redéfini la modernité.
La théorie du chaos, avec sa métaphore des molécules d'eau formant une vague avant de se disperser, illustre ce désordre : un chaos fertile qui porte l'innovation.
La « folie », dans ses instants de lucidité, produit des éclairs de génie. Les visions de Nikola Tesla, perçues comme excentriques, ont anticipé l'électricité sans fil. Les équations de John Nash, élaborées dans des périodes de clarté, ont redéfini l'économie. Ces percées, non linéaires, montrent que la logique humaine n'est pas un chemin droit, mais un labyrinthe où l'intuition, l'erreur et le chaos se croisent. De même, le désaccord avec les consensus normatifs est un moteur de progrès. Socrate, en défiant les vérités athéniennes, a posé les bases de la philosophie. Galileo, en s'opposant à l'Église, a révolutionné l'astronomie. Charles Darwin, en publiant « L'Origine des espèces » en 1859, a provoqué une rupture en défiant le consensus créationniste, une idée non linéaire qui a transformé la biologie. Ignaz Semmelweis, au XIXe siècle, a défié les médecins en prouvant que l'hygiène réduisait les infections, une vérité rejetée par le consensus médical de l'époque.
Ces figures montrent que la créativité prospère lorsqu'elle rejette le loyalisme aux normes.
Pourtant, les frameworks cherchent à harmoniser, à rendre prévisibles. Dans les écoles, les tests standardisés privilégient les réponses conformes, décourageant la pensée divergente essentielle à la pluridisciplinarité. Dans les entreprises, les protocoles rigides marginalisent les idées non conventionnelles. Cette logique linéaire, héritée de Descartes, ignore les ruptures de tendance qui ont façonné l'histoire – de la relativité d'Einstein à l'art moderne de Van Gogh. L'invention du Post-it, née d'un adhésif « raté » par Spencer Silver chez 3M, illustre ce paradoxe : c'est un échec, un désordre, qui a conduit à une innovation. De même, la Révolution française, un chaos social, a bouleversé l'ordre monarchique pour ouvrir une nouvelle ère.
Codifier la créativité, c'est risquer de la réduire à un simulacre d'ordre, loin de son essence chaotique.
Préserver l'unicité humaine : désaccord, valeurs et authenticité
Face à cette matrice normative, comment préserver l'unicité humaine ? D'abord, en célébrant le désordre. Le désordre n'est pas un défaut, mais un « arrangement différent », une vague qui porte de nouvelles possibilités. Les pédagogies comme celle de Maria Montessori, qui encourage l'autonomie et la créativité, montrent qu'il est possible de structurer l'apprentissage sans étouffer l'individualité. En valorisant les intelligences plurielles – logique, émotionnelle, créative – et la pensée non linéaire, les écoles pourraient libérer les potentiels des profils atypiques, qu'il s'agisse d'un futur Léonard de Vinci ou d'un élève « dys » capable de provoquer une rupture de tendance. Une éducation interdisciplinaire, mêlant sciences, arts et philosophie, pourrait encourager ces bonds imprévisibles, comme ceux d'Hypatie ou de Ramanujan. Des programmes intégrants des projets collaboratifs, où les élèves explorent des problèmes sans solutions prédéfinies, favoriseraient la créativité et la dissension.
Ensuite, faisons du désaccord une obligation éthique. Edward Snowden, en défiant la surveillance de masse, a privilégié la vérité sur le loyalisme institutionnel. Hans Hertel, en persistant malgré la censure, a défendu la science contre un consensus rigide. Des mouvements citoyens, comme les manifestations normatives pour le climat menées par Greta Thunberg ou les actions du collectif Anonymous, montrent que le débat et la dissension sont vitaux pour remettre en question les normes établies, souvent linéaires, qui freinent le progrès. Elles permettent de voir les imperfections, mais sont aussi sujettes aux phénomènes de captures et d'instrumentalisation que nous aborderons dans un autre chapitre.
Ces voix, en défiant les consensus économiques ou politiques, incarnent une pensée non linéaire qui pousse à repenser le monde. Ces actes de résistance montrent que le désaccord, loin d'être destructeur, est un rempart contre l'aveuglement normatif. Les valeurs supérieures – justice, liberté, vérité – doivent primer sur le conformisme.
Les limites du loyalisme sont claires : éthiquement, il peut trahir des principes ; socialement, il marginalise les dissidents ; pratiquement, il rejette l'innovation ; contextuellement, il échoue face aux crises.

Repenser les cadres d'évaluation est une autre piste. La "normatisation" ne pourra jamais codifier la pluralité des intelligences humaines, qu'il s'agisse de l'intuition de Tesla, de l'empathie d'un bénévole ou de la vision spatiale d'un architecte. Le QU, en valorisant l'impact social, pourrait être intégré aux systèmes éducatifs pour reconnaître les contributions au-delà des performances académiques. Les outils comme le Big Five pourraient être adaptés pour saisir la fluidité des personnalités, sans imposer un consensus rigide. Une science plus ouverte, respectant la jurisprudence Hertel, devrait publier des recherches non conformes, favorisant la pluridisciplinarité, à la manière de Léonard de Vinci, qui mêlait observation et intuition.
L'authenticité est une clé essentielle. En prenant le temps de l'introspection, loin des cadres normatifs, les individus peuvent retrouver leur chaos intérieur, celui qui a permis à Nikola Tesla d'imaginer l'avenir ou à John Nash de résoudre des énigmes. Les institutions doivent créer des espaces pour les profils atypiques – les « fous », les pluridisciplinaires, les dissidents – comme Michel-Ange, qui a défié les conventions artistiques, ou Einstein, qui a repensé l'univers. Mais il y a une urgence : notre instinct de survie. Les machines, avec leurs algorithmes déterministes, prospèrent dans les cadres normatifs. Les algorithmes prédictifs, comme ceux des plateformes numériques ou des systèmes de santé automatisés, excellent à analyser des modèles linéaires, mais échouent à reproduire l'intuition non linéaire ou les ruptures créatives. Si nous, par paresse, nous laissons enfermer dans ces cadres, nous risquons de perdre ce qui nous distingue : notre créativité, notre non-linéarité, notre capacité à provoquer des ruptures. Steve Jobs, avec sa pensée non conventionnelle mêlant technologie, design et philosophie, a provoqué une rupture de tendance en défiant les normes.
Nous devons cultiver cette créativité, ce débat, cette dissension, pour rester plus forts que les machines.
Embrasser le chaos pour libérer l'humain
Les frameworks, avec leur promesse d'ordre et d'efficacité, sont des outils puissants, mais ils portent un risque : celui d'étouffer ce qui fait l'humanité. Le consensus qu'ils imposent, le loyalisme qu'ils exigent, et la logique linéaire qu'ils privilégient entrent en conflit avec notre désordre, notre pluridisciplinarité, notre « folie ». Nos intelligences plurielles, nos ruptures de tendance, notre capacité à penser de manière non linéaire et à provoquer le débat sont des forces que la "normalisation" ne pourra jamais codifier. « C'est dans le chaos – celui de Socrate défiant Athènes, de Léonard de Vinci esquissant des machines impossibles, ou de Snowden révélant des vérités cachées – que l'humain trouve son authenticité. »
Les valeurs supérieures, qu'il s'agisse de justice ou de liberté, nous appellent à désobéir lorsque les normes nous aveuglent.
En célébrant le désordre, en cultivant le débat et la dissension, en valorisant des cadres comme le QU, nous pouvons transformer les frameworks en outils qui amplifient, plutôt qu'ils ne limitent, notre créativité. Sans cette vigilance, nous risquons, par paresse, de laisser les machines, avec leur logique linéaire, surpasser notre chaos créatif. Notre survie dépend de notre capacité à embrasser notre non-linéarité, nos intelligences plurielles, et notre courage de défier les normes. Le prochain article de cette série explorera les usages modernes des frameworks dans la gestion de l'information, où des approches systématiques et probabilistes redéfinissent notre rapport à la vérité.
D'ici là, souvenons-nous : l'humain n'est pas une machine. Il est une vague, un chaos magnifique, et c'est dans ce désordre qu'il écrit son histoire.
